digiSchool s’est entretenu avec Aline Aubertin, présidente de l’association Femmes Ingénieurs. Aline Aubertin nous présente l’association, ses missions et les enjeux de la féminisation des formations scientifiques et techniques.
Présentez-nous l’association Femmes Ingénieurs
L’association Femmes Ingénieurs est une association loi 1901 existante depuis 1982. Notre siège social se situe à Paris, chez IESF (Ingénieurs et Scientifiques de France). L’association Femmes Ingénieurs cible des personnes physiques, c’est à dire des individus exerçant des activités d’ingénieurs et scientifiques mais nous sommes également ouverts a l’adhésion des personnes morales : associations et entreprises. Cinq entreprises sont ainsi adhérentes : GE, RTE, Nexter, Orange et Bouygues Telecom.
Quels sont vos objectifs ?
Notre but est double. Tout d’abord, nous faisons la promotion du métier d’ingénieur auprès des jeunes filles dans le monde de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur. Nous avons un agrément avec le Ministère de l’Education Nationale : toutes nos actions sont réalisées dans un cadre juridique clair.
Ensuite, nous veillons à la promotion des femmes ingénieurs et scientifiques dans le monde du travail, par des actions auprès de politiques et des institutions nationales et internationales. Nous valorisons notre spécificité d’ingénieur, notre savoir-faire et nos expertises en travaillant de concert avec des acteurs/actrices engagées et des entreprises.
Ces missions sont de plus en plus importantes, depuis que la loi Copé-Zimmermann relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle est passée (janvier 2011). Cette loi prévoit en effet que les conseils d’administration des entreprises moyennes ou grandes soient composés en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes.
Quelles initiatives menez-vous pour promouvoir le métier d’ingénieur auprès des jeunes filles ?
Nous intervenons beaucoup au sein des lycées afin de sensibiliser les jeunes filles de seconde et de première au métier d’ingénieur. Nous avons un vivier d’ambassadrices qui vont dans les lycées pour parler des métiers. Plus de 250 femmes ambassadrices partout en France nous accompagnent dans ces missions auprès des étudiantes. L’association Femmes Ingénieurs possède en effet des déléguées régionales présentes sur tout le territoire.
Nous faisons également beaucoup de lobbying auprès des pouvoirs publics. Nous sommes en lien avec le Ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur ainsi qu’avec le Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Nous faisions partie du comité d’organisation du Global Summit of Women de Juin 2013. Le Global Summit of Women réunit annuellement depuis 23 ans plus de 1 000 femmes du monde entier, dirigeantes d’entreprises de toute taille, femmes d’affaires, ou encore cheffes d’organisations non gouvernementales tournées vers le développement économique, dans le but de promouvoir la participation des femmes à la vie et l’activité économique et le leadership au féminin.
Nous soutenons également le « Shadowing Day » de l’entreprise Orange : une jeune lycéenne suit, comme son ombre, une ingénieure expérimentée en situation de travail pendant une journée. C’est une expérience très enrichissante pour les jeunes demoiselles qui ont eu la chance d’y participer.
Enfin, nous menons diverses enquêtes et publions des chiffres afin de dresser un état des lieux concret de la situation des ingénieures en France.
Voyez-vous une évolution dans l’orientation des filles vers les études d’ingénieurs ?
Hélas, les choses progressent extrêmement lentement. Trop lentement. Nous avons dépassé la barre des 20% de femmes ingénieures en France cette année, mais cela reste encore timide. Les femmes ingénieures demeurent bien trop minoritaires aujourd’hui en France. C’est insuffisant au regard de l’attente et des besoins des entreprises.
Quels sont les principaux freins ?
Les métiers liés à l’ingénierie sont encore très connotés masculin. Les filles ont du mal à s’imaginer ingénieur. La faute revient également aux parents qui ne poussent pas suffisamment leurs filles vers ces formations, par peur, par méconnaissance ou à cause des stéréotypes qui ont la vie dure. Les professeurs devraient également sensibiliser les parents à l’avenir radieux promis aux ingénieurs, femmes ou hommes, de nos jours.
De plus, les filles, elles-mêmes, ont besoin de se projeter dans quelque chose de concret. Elles ne savent parfois même pas ce que signifie « être ingénieur ». Il faut dire que le métier d’ingénieur est difficilement définissable. C’est également une des difficultés : les missions d’un ingénieur varient d’un poste à un autre et sont même amenées à évoluer tout au long de sa carrière.
Le fait que les jeunes filles aient du mal à comprendre ce que fait un ingénieur au quotidien émane également d’un manque de rencontre avec des femmes ingénieures en poste qui pourraient témoigner et leur raconter leur quotidien. Il y a donc un gros travail à faire pour mettre en relation les entreprises et les jeunes filles.
Car une chose est certaine et je le vois au quotidien : les débouchés sont énormes, il y a très peu de chômage, les revenus sont attrayants et les ingénieurs jouissent d’une très belle qualité de vie ! Il n’y a aucune raison pour que les filles ne se lancent pas dans l’aventure. Bien au contraire, être ingénieur lorsqu’on est une femme comporte de nombreux avantages !
Source : digischool.fr
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